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Évangélisation des milieux

Réflexion sur la mission du MC et de tout chrétien : témoigner de sa foi... particulièrement auprès des "loin de Dieu et de l'Église"!

AU PAYS DE
L'ÉVANGÉLISATION

par GILLES BARIL, prêtre
Animateur spirituel
national du MCFC
  1. Qui doit évangéliser?
  2. Comment demeurer crédible?
  3. Acteurs de l'évangélisation
    - les prêtres et les diacres permanents

Les principaux acteurs de l'évangélisation:

Les prêtres et les diacres

 

Un prêtre a des qualités et des talents, mais aucun prêtre, comme aucun humain, ne possède toutes les qualités (et aucun défaut). De plus, nos communautés liturgiques se composent de jeunes et d’aînés, d’hommes et de femmes au vécu multiple, de gens intellectuels et de gens manuels… alors pas facile d’avoir un discours qui rejoint chaque personne de façon intime, chaque semaine. Le point d’unité demeure le désir de connaître et de vivre Jésus-Christ. Ce qui amène à penser que la vocation du prêtre diocésain consiste à :

  1. S’occuper des 72 disciples
  2. Garder la préoccupation de ceux qui occupent « la dernière place »
  3. Se nourrir pour devenir nourriture

 

1.   S’occuper des 72 disciples

chef d'orchestreUn bon chef d’orchestre n’a pas l’obligation de savoir jouer tous les instruments de musique. Par contre, il doit veiller à l’harmonisation des instruments pour que le concert demeure agréable. De même, le prêtre n’est pas obligé d’être à l’origine de toutes les initiatives pastorales : l’Esprit-Saint peut inspirer ailleurs qu’au presbytère le bien à faire pour l’évolution de la communauté chrétienne… ce qui fait du prêtre un homme en constante conversion personnelle comme c’est le défi de tous les baptisés.

Le ministre ordonné (prêtre et diacre permanent) ne doit jamais oublier qu’il est en recherche de Dieu avec les autres membres de la communauté. Il doit lui aussi se convertir chaque jour, se laisser enseigner par les évènements, se ressourcer au contact des autres, prier, vivre les sacrements… Avec la meilleure volonté du monde, il lui est impossible de vivre en proximité avec chaque résident du territoire qui lui est confié. Il doit par conséquent favoriser à tous ceux et celles qui veulent s’engager au service du Christ de le faire en établissant des solidarités avec eux. Ces gens qui deviennent les "72 disciples" que Jésus envoie en mission au cœur de la communauté. L’essentiel n’est pas d’avoir chaque dimanche des églises pleines de fidèles (ce qui demeure une belle consolation), mais de retrouver dans nos églises des gens qui ont en eux le feu sacré de l’Évangile : des croyants(es) convaincus(es) et engagés(es) demeurent la plus belle source d’interpellation pour saisir les réalités de la foi.

Envoi des 72 disciples, par James Tissot"S’occuper des 72 disciples", c’est aimer les gens qui nous entourent, discerner avec eux les besoins de la communauté et les inviter à mettre leurs talents au service des autres. C’est aussi apprendre à excuser au lieu de critiquer, faire silence sur les erreurs de parcours, prendre la défense de celui ou celle qui est injustement critiqué, s’intéresser à ce que l’autre vit, établir des relations franches et cordiales dans le soutien mutuel et avoir beaucoup, beaucoup de gratitude sincère pour le travail accompli par les collaborateurs et collaboratrices.

Pasteur avec collaborateursL’humilité et la douceur sont nécessaires pour exercer un bon leadership pastoral. L’ouverture sur la nouveauté et la créativité sont aussi des éléments importants pour éviter que la communauté se replie sur elle-même. Savoir regarder et écouter, interpeller, ouvrir des portes, encourager et soutenir, identifier les besoins et chercher ensemble des solutions, trouver le sens de tout ce qui se vit… et surtout demeurer artisan de joie, de cette joie qui jaillit du consentement à l’espérance.

Voilà le « vivre avec » de Jésus de Nazareth au quotidien.

Un vitrail ignore que la lumière qui le traverse le rend plus inspirant : ainsi le pasteur heureux entouré de nombreux collaborateurs et collaboratrices est une source extraordinaire pour dire Dieu aux chercheurs de notre temps.

 

2. Garder la préoccupation de ceux qui occupent « la dernière place »*

Pour demeurer crédible ou pour retrouver notre crédibilité comme Église au sein d’une société sécularisée, il faut devenir témoin de la miséricorde et du pardon. Ne jamais juger. Accueillir chaque personne dans ses pauvretés. Beaucoup de gens sont blessés et ont besoin de guérison intérieure et c’est l’attention à leur vécu qui va ouvrir la porte de leur cœur à l’Évangile. Savoir écouter l’autre, c’est lui permettre de se sentir considéré… ce qui devient le premier pas vers le ministère de guérison.

Dans chaque collectivité humaine, il y a des gens que personne n’écoute : leur donner de l’attention, c’est leur transmettre le courage de demeurer vivant… et souvent, ces gens que personne n’écoute nous dévoilent des perspectives nouvelles de la vie auxquelles nous ne nous sommes jamais arrêtés.

Comment les rejoindre? Dans des espaces de gratuité au milieu des multiples activités de nos journées, comme par exemple, en prenant le temps de dire quelques mots aux gens rencontrés sur la rue, à l’épicerie ou au dépanneur où on va chercher une pinte de lait… à défaut de pouvoir faire la visite de paroisse.

Garder la préoccupation de ceux qui occupent la dernière place, c’est « s’occuper des touaregs » à la manière de Frère Charles. C’est se donner sans rien attendre en retour. Permettez-moi un exemple : on avait demandé à un couple de prendre sous leur responsabilité un enfant de cinq ans qui avait déjà connu six foyers d’accueil depuis sa naissance. Ne se sentant pas aimé, l’enfant avait développé la manie de mordre les gens quand ceux-ci le contrariaient… « L’accueillir, dit la femme à son mari, c’est se laisser mordre par lui pour lui montrer qu’il vaut plus que ce moyen de défense qu’il a développé pour se protéger… » Ce qu’ils ont fait… pour finalement s’attacher à lui et en faire un adulte équilibré…

Garder la préoccupation de ceux qui occupent la dernière place, c’est prendre le risque de se laisser mordre pour permettre à l’autre de découvrir ses sources intérieures… pour en venir à se demander :

« Y a-t-il beaucoup d’amour du Bon Dieu dans ce que je dis ou dans ce que je fais? » (Expression empruntée à l’évêque qui nomme Jean-Marie Vianney à Ars comme curé en lui disant : « Il n’y a pas beaucoup d’amour du Bon Dieu dans cette paroisse, vous en mettrez ».)

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Publié avec l'autorisation de l'auteur
Extrait de: Le quotidien de l'Évangile, Gilles Baril, prêtre, p. 102-106
(*) voilà une expression empruntée à la spiritualité de Charles de Foucauld.
Source des images: chef d'orchestre; envoi des 72 disciples, par James Tissot; entouré de proches collaborateurs;