Le Cursillo, par la grâce de Dieu, les prières de beaucoup de gens et la ferme volonté de quelques-uns, réussit à faire prendre conscience à l’homme et à la femme qu’ils sont des personnes et par conséquent qu’ils sont capables de recevoir la bonne nouvelle que Dieu, en Christ, les aime. Lorsqu’une personne humaine, en effet, fait la rencontre de l’Esprit de Dieu, croit en Lui et s’efforce de répondre à son invitation, elle change alors de vision, de perspective et trouve un nouveau sens à la vie. Lorsque se termine un Cursillo, le Christ peut compter sur des chrétiens qui savourent lucidement et avec joie, la grâce d’être baptisés et d’être chrétiens. Ce sont des chrétiens nouveaux, ou mieux renouvelés, car ils ont compris la grâce de l’être en esprit et en vérité.
Il n’est donc pas étonnant que nous, cursillistes, nous nous sentions interpellés par le décret conciliaire sur l’apostolat des laïcs, quand il dit:
«Les laïcs exercent leur multiple apostolat tant dans l’Église que dans le monde (…) Les laïcs doués de véritable esprit apostolique ramènent à l’Église ceux qui sont éloignés». Et le Conseil Pontifical pour les Laïcs précise que «la structure paroissiale est à la fois trop étroite et trop vaste pour satisfaire les besoins de la pastorale et la formation de l’ensemble des fidèles».
Aussi nous sommes encouragés par les mots que nous a laissés Jean-Paul II lors de la 4e Ultreya nationale d’Italie: «Votre Mouvement exige que vous soyez ferment dans la masse du monde». C’était justement le thème de la deuxième Ultreya mondiale qui eut lieu à Rome: «Évangéliser les milieux : un défi pour le MC». Parce que cette masse et ces milieux ont toujours été la finalité première des Cursillos depuis leurs origines. Cette masse et ces milieux – spécialement celui des distants – voilà justement le noyau où le MC doit concentrer toute son action apostolique.
Ceci étant dit, pour parler de la contribution du MC au renouveau de la paroisse je commence par souligner que notre Mouvement a toujours eu une vision claire du rôle du laïc dans l’action missionnaire de l’Église, qui est l’objectif apostolique de tout baptisé, vers lequel doit converger la personne, l’évangile et le monde dans lequel nous vivons. Or, cette conception est orientée surtout dans la perspective du rapprochement avec les distants qui sont généralement ceux qui perçoivent le mieux l’identité entre leur désir de bonheur et la vie du Christ, dès qu’ils la voient réalisée chez des cursillistes qui deviennent rapidement leurs amis. En effet, lorsque les distants saisissent la Bonne Nouvelle, leur absence de «corsets» historico-religieux leur permet une créativité évangélique étonnante. Voilà la raison, et il n’y en a pas d’autre, pour laquelle la rencontre avec les distants ne peut pas échouer. C’est un environnement fondé sur l’amitié, en ses deux versants: l’un d’intimité avec la réunion de groupe, et l’autre d’universalité avec l’Ultreya.
Dans le MC, nous avons toujours voulu, par fidélité à notre charisme originel, une parfaite coordination avec la pastorale ecclésiale, en proclamant haut et fort que le Mouvement n’a pas d’autre spiritualité que celle de l’Église. Tout cela est en cohérence avec le fait que les Cursillos n’ont pas été le fruit d’une recherche empirique, mais d’une intuition qui progressivement s’est transformée en un instrument merveilleux dont les bases profondes s’appuient sur l’Évangile, sont corroborées par le Concile et encouragées par les Souverains Pontifes.
Personnellement, je pense que le MC se situe au-delà de l’apostolat individuel que Vatican II a assigné comme essentiel dans la vie de tout laïc qui a la foi. D’après moi, le MC n’est ni une organisation ni une communauté avec des buts spécifiques. J’estime que le MC est massivement un Mouvement de laïcs, mais sans l’être exclusivement, comme cela est bien évident pour tous ceux qui ont vécu l’expérience dans une complémentarité dialectique entre laïcs et clercs.
Je dois ajouter un mot du recrutement des cursillistes, et spécialement des nouveaux candidats, de la part de certains curés, de façon à les incorporer dans les tâches paroissiales (catéchèse, action sociale, soin des malades, ministères liturgiques, etc.). Je considère que cette récupération ne sera pas bénéfique pour le candidat en question, surtout parce que cet embrigadement lui enlèvera du temps pour réaliser son action chrétienne spécifique qui est de devenir un témoin du Christ dans le milieu même où le Seigneur l’a planté.
Il est évident que le cursilliste – comme tout être humain – ressent l’impérieux besoin d’être compris, c’est-à-dire, d’être et de se sentir aimé. Il est dommage que l’on ne se rende pas compte qu’en utilisant les nouveaux cursillistes convertis dans cette pastorale à l’intérieur de l’église, on a ainsi privé l’authentique pastorale missionnaire de sa part la plus humaine, la plus spontanée, la plus à la fine pointe de la société, et par conséquent, celle qui a le plus de chance d’être intégralement chrétienne.
L’élément le plus novateur du MC est de lancer le laïc sur une piste bien spécifique, avec son style bien particulier, le sien, celui que Dieu lui a donné, en le poussant à la joyeuse aventure de lui faciliter le chemin pour faire la rencontre de soi, afin que, à partir de lui-même, il puisse découvrir que la rencontre avec le Christ et avec les autres ira en se dilatant jusqu’à devenir une véritable amitié, au moyen de la Réunion de Groupe et de l’Ultreya.
Il va de soi qu’il est juste de reconnaître qu’à l’ombre des paroisses et de nombreuses associations, il y a beaucoup d’hommes, de femmes, de jeunes et d’enfants qui ont pu croître et se développer, pour la gloire de la sainte Église. Parmi eux, il existe donc des personnes qui sont de véritables arguments vivants de la fécondité de la paroisse. Cependant, je me permets de faire remarquer que le type de communauté nécessaire maintenant au monde – et partant à l’Église même – doit être marqué par la gratuité la plus désintéressée : il faut prendre au sérieux chacun des individus pour ce qu’il est – une personne – et non pas pour ce qu’il a, ni pour ce qu’il sait, ni pour ce qu’il peut faire, ni même pour ce qu’il pourrait apporter à l’Église. Car tout cela empêche que transparaisse dans sa plus grande clarté la tendresse de Dieu, car le sens de la réalité coïncide avec le sens de l’Évangile, qui est l’amour. Je ne comprends pas la prétention de ceux qui ont voulu enlever au laïc le rôle spécifique que le Mouvement des Cursillos lui avait donné. C’est comme vouloir couper une des branches les plus vivantes que l’Évangile soit parvenu à faire vivre par les prêtres et les laïcs, en persévérant et en croissant en Christ au moyen d’une amitié vécue de façon personnelle dans la Réunion de Groupe et communautairement dans l’Ultreya. La Réunion de Groupe, en effet, c’est l’amitié portée au niveau surnaturel pour créer une ambiance qui rend possible le partage authentique, continu et progressif de l’essentiel chrétien, pour que ce qu’il y a de mieux en chacun puisse croître à la limite du possible. Quelle espérance!
Je termine en faisant miennes les mots du Pape Ratzinger :
«Ce qui donne le plus d’espérance dans l’Église d’aujourd’hui, c’est la floraison de nouveaux Mouvements que personne n’avait prévus et qui surgissent spontanément de la vitalité de l’Église. Il est merveilleux de voir que l’Esprit Saint soit, une fois de plus, plus puissant que nos projets. Le renouveau est silencieux mais il progresse avec efficacité» (Rapport sur la foi).
Eduardo Bonnín
Rome, 23 septembre 2006,
durant l’Assemblée Générale du CPL (Conseil Pontifical des Laïcs)