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Réflexion sur l'évangile du 27e dimanche ordinaire, B

Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.

 



 

 

Marc 10, 2-16

Un jour, des pharisiens abordèrent Jésus et, pour le mettre à l’épreuve, ils lui demandaient : «Est-il permis à un mari de renvoyer sa femme?» Jésus dit : «Que vous a prescrit Moïse?» Ils lui répondirent : «Moïse a permis de renvoyer sa femme à condition d’établir un acte de répudiation.»

Jésus répliqua : «C’est en raison de votre endurcissement qu’il a formulé cette loi. Mais, au commencement de la création, Dieu les fit homme et femme. À cause de cela, l’homme quittera son père et sa mère, il s’attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu’un. Ainsi, ils ne sont plus deux, mais ils ne font qu’un. Donc, ce que Dieu a uni, que l’homme ne le sépare pas!»

De retour à la maison, les disciples l’interrogeaient de nouveau sur cette question. Il leur répond : «Celui qui renvoie sa femme pour en épouser une autre est coupable d’adultère envers elle. Si une femme a renvoyé son mari et en épouse un autre, elle est coupable d’adultère.»

On présentait à Jésus des enfants pour les lui faire toucher; mais les disciples les écartèrent vivement. Voyant cela, Jésus se fâcha et leur dit: «Laissez les enfants venir à moi. Ne les empêchez pas, car le royaume de Dieu est à ceux qui leur ressemblent. Amen, je vous le dis: Celui qui n’accueille pas le royaume de Dieu à la manière d’un enfant n’y entrera pas.» Il les embrassait et les bénissait en leur imposant les mains.

 

27e dimanche ordinaire - B

photo du Père Allard


Bonne nouvelle

 

Il n’y a pas si longtemps, un vieux prêtre me disait : «Si, à partir du texte de la parole de Dieu, l’homélie n’est pas «une bonne nouvelle», c’est que le curé n’a pas bien préparé son homélie ou que les paroissiens ont mal compris les lectures du dimanche. La parole de Dieu n’est pas une leçon de morale mais une bonne nouvelle» (c’est le sens du mot évangile en grec). Quelle est cette bonne nouvelle dans le discours de Jésus sur le mariage et le divorce?

Tout d’abord, nous constatons que les pharisiens ne sont pas intéressés à connaître la vérité. Ils questionnent Jésus pour le prendre en défaut : «c’était pour le mettre à l’épreuve». Au temps de Moïse et au temps de Jésus, tout comme aujourd’hui, le divorce était permis. Dans presque tous les pays du monde, il existe une législation réglementant le divorce et le remariage.

L’expérience nous enseigne que dans les couples, toutes sortes de situations déplorables se développent : ça ne fonctionne pas toujours comme on l’avait prévu, les gens font de graves erreurs, il y a les infidélités, l’oppression et la violence à l’intérieur des familles, les incompréhensions et les silences mortels. Il en résulte des séparations et des divorces. Ensuite, il existe certains couples qui ne se séparent pas mais qui ne se parlent plus, qui refuse de se pardonner, de se réconcilier, de reprendre le dialogue.

jeune coupleLa bonne nouvelle d’aujourd’hui se retrouve dans les attitudes et les valeurs que le Christ nous propose sur le mariage. Pour lui, le mariage n’est pas un contrat mais une alliance, et dans une alliance, les personnes sont toujours plus importantes que les institutions. Le Christ est celui qui s’occupe d’abord des personnes avant d’accuser et de lancer des pierres. Nous voyons comment il traite la Samaritaine avec ses six maris, la femme adultère en danger d’être lapidée, Marie Madeleine la prostituée, Zachée le collecteur d’impôts, les lépreux mis au ban de la société. Tous sont des exemples de la tendresse de Dieu, malgré la condition sociale souvent pénible et parfois répréhensible, où se retrouvent ces personnes.

Jésus mentionne que dans le mariage, la réciprocité doit être totale : les hommes et les femmes ont les mêmes droits et les mêmes devoirs. «Quiconque répudie sa femme et en épouse une autre…» «Si une femme répudie son mari et en épouse un autre…» - Le droit juif ne permettait qu’à l’homme de divorcer, le droit romain permettait aux deux partenaires de le faire! Dans S. Marc, Jésus utilise le droit romain, plus juste et plus égalitaire.

L’argumentation de Jésus est en fait une défense de la femme. La femme n’est pas un objet jetable que l’on acquiert et dont on peut se débarrasser selon le bon vouloir du mari ! La loi juive disait : «Lorsqu’un homme aura pris une femme et l’aura épousée, s’il advient qu’elle ne trouve plus grâce à ses yeux parce qu’il a trouvé en elle quelque chose de choquant, il écrira pour elle une lettre de répudiation, la lui remettra en main, et la renverra de sa maison» (Deutéronome 24,1). Selon l’une des deux écoles de pensée au temps de Jésus, il suffisait que la femme déplaise à son mari, qu’elle brûle son repas par exemple, pour qu’il puisse la renvoyer. Au temps de Moïse, l’homme n’avait qu’à répéter trois fois : «je veux te divorcer» pour renvoyer la femme. Moïse, afin de rendre le divorce plus difficile, avait imposé «l’acte de divorce» - procédure compliquée à une époque où les gens ne savaient ni lire ni écrire. Il avait imposé cette procédure afin de protéger les femmes qui, dans la culture du temps, n’avaient aucun droit. C’est pourquoi Jésus ajoute que c’est à cause de leur «sclérose du cœur» (sclérocardia) que Moïse a promulgué cette loi. Saint Paul, que l’on accuse souvent de misogynie et qui en fait l’était beaucoup moins que les hommes de son temps, écrivait dans la lettre aux Éphésiens : «Les maris doivent aimer leurs femmes comme leurs propres corps. Aimer sa femme, c'est s'aimer soi-même. Car nul n'a jamais haï sa propre chair; on la nourrit au contraire et on en prend soin. C’est justement ce que le Christ a fait pour son Église : ne sommes-nous pas les membres de son corps ? Voici donc que l'homme quittera son père et sa mère pour s'attacher à sa femme, et les deux ne feront qu'une seule chair : ce mystère est de grande portée; je veux dire qu'il s'applique au Christ et à l'Église. Bref, en ce qui vous concerne, que chacun aime sa femme comme soi-même, et que la femme révère son mari.» (Ep 5, 22-33)

mariage durableL’union entre deux personnes ne dépend pas seulement du «oui» prononcé au cours de la cérémonie du mariage... Il faut le renouveler tous les jours. S’il est beau de voir un couple s’unir dans le mariage, c’est encore plus beau de célébrer les 30e, 40e, 50e anniversaires de mariage d’un couple qui a toute une vie commune à son compte.

L’amour est comme le feu. Si l’on ne veut pas qu’il meure, il faut l’entretenir. D’où l’importance des gestes d’affection, du dialogue, des cadeaux, des mots de tendresse. Le mariage, dans le plan de Dieu, c’est quelque chose de beau, de sérieux, qui doit se construire au jour le jour. C’est plus qu’un contrat, c’est une alliance. Pour Jésus l’amour est fondé sur la tendresse du coeur et non sur des rapports de force; l’amour ne peut se vivre que dans la réciprocité et l’égalité. Il existe, selon lui, des attitudes, des façons d’agir dans le mariage qui assurent la stabilité et le respect du conjoint et des enfants. Le péché ou le mal ne consiste pas à enfreindre une loi, mais à briser les liens d’une relation importante. Cette rupture entraîne des résultats souvent pénibles et même parfois catastrophiques pour le couple et pour les enfants.

«Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa, homme et femme il les créa.» C’est là l’idéal présenté par le Seigneur sur l’institution du mariage. Mais il sera toujours plein de tendresse pour tous, incluant les divorcés et les partenaires de mariages brisés. Les paroles de Jésus sont encore aujourd’hui une bonne nouvelle pour tous.