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Réflexion sur l'évangile du 3e dimanche de Pâques, C

Par le Père Yvon-Michel Allard, s.v.d., directeur du Centre biblique des Missionnaires du Verbe Divin, Granby, QC, Canada.

 



 

Actes des Apôtres
(5, 27b-32.40b-41)

«Les Apôtres comparais- saient devant le grand conseil; le grand prêtre les interrogea: «Nous vous avions formellement interdit d’enseigner le nom de cet homme-là, et voilà que vous remplissez Jérusalem de votre enseignement. Voulez-vous donc faire retomber sur nous le sang de cet homme?» Pierre, avec les Apôtres, répondit alors: «Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. Le Dieu de nos pères a ressuscité Jésus, que vous aviez exécuté en le pendant au bois du supplice. C'est lui que Dieu, par sa puissance, a élevé en faisant de lui le Chef, le Sauveur, pour apporter à Israël la conversion et le pardon des péchés. Quant à nous, nous sommes les témoins de tout cela, avec l’Esprit Saint, que Dieu a donné à ceux qui lui obéissent.

On interdit alors aux Apôtres, après les avoir fouettés, de parler au nom de Jésus, puis on les relâcha. Mais eux, en sortant du grand conseil, repartaient tout joyeux d'avoir été jugés dignes de subir des humiliations pour le nom de Jésus.
Évangile : Jean 21, 1-9 »

3e dimanche de Pâques - C

photo du Père Allard


"Il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes"

 

Depuis Pâques, le lectionnaire puise abondamment dans les Actes des Apôtres. Les textes nous décrivent l'expérience des premières communautés chrétiennes, après la mort et la résurrection de Jésus.

Chaque «premier jour de la semaine», le jour du Seigneur, ils se réunissent et le Christ se glisse mystérieusement parmi eux. Il leur apporte la paix, la joie, et le don de l'Esprit Saint. Petit à petit, leur angoisse et leur peur disparaissent. Ils déverrouillent les portes et s'affichent au grand jour. Après l'abandon, la lâcheté, la peur, le désespoir, ils sortent maintenant sur la place publique et témoignent du Christ ressuscité. Aujourd'hui, nous les retrouvons devant les autorités religieuses qui leur avaient défendu de parler de Jésus, et qui croyaient avoir ainsi réglé le problème de façon définitive.

Les disciples ont su dire «non» à cet ordre exprimé sur un ton de menace : « Nous vous avions formellement interdit d'enseigner en ce nom-là. Or voici que vous remplissez Jérusalem de votre enseignement! ». Ils ont su désobéir aux autorités par obéissance à Dieu. Ils ont dit «non » à ceux qui voulaient les empêcher de parler de Jésus Christ.

«Il nous est impossible de ne pas parler de ce que nous avons vu et entendu» (Actes 4, 20). «Le Dieu de nos pères a ressuscité Jésus, que vous aviez exécuté en le pendant au bois du supplice.»

Pierre prend la parole au nom des Douze lorsqu'il répond au grand prêtre : «Il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes». Lui qui avait renié Jésus par gêne, par honte et par peur, une fois revêtu de la force de l'Esprit, il devient capable de témoigner du Christ avec audace et même au risque de sa vie.

Les textes de ce matin s'appliquent aussi bien à notre réalité d'aujourd'hui qu'à celle du temps des premiers chrétiens après la résurrection.

Chaque civilisation a ses certitudes et les dirigeants n'acceptent pas facilement que les gens soient en désaccord avec eux. Aujourd'hui les dogmes modernes sont : la liberté d'expression, la démocratie à l'américaine, le capitalisme sans loi, le marché du libre échange, la séparation de l'Église et de l'État, la laïcité pure, la guerre préventive, la sécurité nationale, l'importance d'être numéro un, etc.

Critiquer, contester le système en place, ouvrir une brèche, c'est ébranler tout l'édifice, qui repose sur l'illusion d'être universel, total et absolu.

Les apôtres ont eu le courage de résister aux pressions exercées par les dirigeants et ont continué à annoncer Jésus Christ ressuscité. Depuis vingt siècles, leur geste de défie est une inspiration pour chacun de nous : «Il faut obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes».

Les chrétiennes et les chrétiens qui veulent rester fidèle à l'évangile doivent savoir dire non de temps à autre. Le grand prêtre voudrait bien assurer le consensus, la normalité, extirper le désir de penser librement, suffoquer la contestation. Les dirigeants exigent souvent une approbation inconditionnelle et font tout pour discréditer, ridiculiser, démolir ceux qui ne pensent pas comme eux : «Si tu veux avoir du succès dans la vie, tu dois être d'accord avec ceux qui gouvernent! Si tu veux faire carrière, obtenir un poste de directeur, une fonction politique, tu dois apprendre à penser comme ceux du parti! Si tu veux faire de l'argent, il faut jouer selon les règles imposées par le marché, même si ce jeu n'est pas toujours propre et honnête!»

Jésus nous dit ce matin : «N'ayez pas peur d'être différents.»

Être chrétien signifie maintenir notre liberté de penser et d’agir, savoir s’opposer à ce qui est injuste, dire non à ce qui va contre le droit des personnes innocentes, être capable de défendre la sacralité de l’être humain, promouvoir la dignité de toute personne, indépendamment de sa race, sa nationalité, ses allégeances politiques, sa religion ou sa culture.

Après la résurrection, les apôtres ont présenté un témoignage plein de fermeté mais sans arrogance et sans provocation, un témoignage au nom de Jésus et non pas en leur nom personnel ou au nom de leur propre groupe!

Le chrétien doit avoir une approche critique vis-à-vis la société, la politique, la religion, la culture, la tradition, tout en maintenant une attitude de dialogue, de réconciliation, de fraternité et de collaboration.

En tout temps, nous devons être au service du progrès de l’être humain, de sa libération intégrale et de sa liberté d’enfant de Dieu. C'est pourquoi il nous faut savoir « obéir à Dieu plutôt qu'aux hommes ».

 

Source des photos: Méditation, par Rembrandt, Musée du Louvre.;