par Roger Gauthier, o.m.i.
Jésus en était encore à constituer son petit groupe de disciples quand il nous amena, avec lui, à des noces auxquelles il était invité avec sa mère et sa parenté. Jusque là, il nous avait beaucoup parlé du Royaume de Dieu dont ilsemblait tellement préoccupé.
Quelques-uns d’entre nous avaient déjà vécu avec Jean le Baptiste au désert et l’avaient imité dans son austérité pour provoquer le monde à la conversion.
Pour eux, passer une journée à la noce avec celui que nous croyions être le Messie constituait un contraste étonnant, c’est le moins qu’on puisse dire. Cependant il nous séduisait et nous lui faisions pleine confiance. Ce fut donc la fête pour tout le monde! Pour Jésus aussi! Il était beau à voir éclater de joie, taquiner les gens de sa parenté, porter un toast pour le bonheur des nouveaux mariés.
Les convives étaient plus nombreux que prévus de sorte qu’on manqua de vin avant la fin de la journée. Bien sûr, les nouveaux mariés en étaient bouleversés et très gênés. Ce serait un triste souvenir de leur mariage et un mauvais présage! La mère de Jésus fut la première à remarquer le malaise; elle en informa Jésus qui lui répondit : « Que veux-tu que j’y fasse? » – Jusqu’à ce jour, il n’avait encore produit aucun miracle devant nous et ne croyait pas devoir commencer pendant une fête de noces. Du moins, ce fut notre interprétation de la réponse qu’il avait fait à sa mère. Plus tard, sa mère nous expliqua ce qui s’était passé. Elle s’était rappelé ce que les Écritures disaient du futur Messie : qu’il serait envoyé pour secourir les malheureux. Elle prit donc le risque de sa foi en la mission de Jésus et dit aux serviteurs : « Quoiqu’il vous dise, faites-le ». Évidemment que Jésus ne pouvait pas humilier sa mère en ignorant son intervention. D’ailleurs, elle représentait toujours pour lui, vrai homme, l’autorité porteuse de la volonté du Père. Il s’exécuta. Indiquant six jarres de pierres destinées aux purifications demandées par la Loi, Jésus dit :
« Remplissez-moi d’eau ces jarres-là jusqu’au bord ». Chacune pouvait contenir jusqu’à 120 litres. Les serviteurs les remplirent. Jésus leur dit : « Maintenant allez en porter un échantillon au maître du repas ». Celui-ci le goûta. Sans savoir d’où venait ce vin, il fit remarquer au marié : « Habituellement, tout le monde offre d’abord le bon vin et, lorsque les convives sont gris, il fait servir le moins bon. Pourquoi as-tu gardé le meilleur pour la fin? ». Et la fête continua encore longtemps.
Voilà comment nous avons été témoins du premier miracle de Jésus. Sur le fait, nous y avons vu surtout une manifestation de sa puissance. À ce moment-là, nous avions besoin d’un miracle éclatant et gratuit pour être confirmés dans notre confiance en un Jésus capable de tout faire, un Jésus que nous pourrions reconnaître comme le Maître envoyé de Dieu pour sauver Israël. Plus tard, nous avons compris que ses miracles n’étaient pas faits pour étaler sa puissance, mais pour être vus comme signes de son amour, car il ne les produisait que pour des gens malheureux ou mal pris. Et il recommandait toujours de n’en pas faire étalage auprès des gens uniquement affamés de voir éclater la puissance divine.
Au lendemain de cette journée de noces, nous échangions sur ce que nous vivions dans notre cœur. Pour chacun, le plus étonnant venait du fait que Jésus avait choisi de nous manifester sa puissance de Messie en multipliant un vin de fête plutôt qu’en provoquant une conversion éclatante de pécheur. Je dois dire que ses comportements nous ont étonnés encore bien des fois pendant les trois ans où nous l’avons suivi.
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