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Choix de textes sur la prière

Textes provenant d'auteurs spirituels ou extraits de documents officiels de l'Église

Benoit XVI

Prière de Jésus lors de la Dernière Cène

 

Catéchèse de Benoît XVI sur la prière
l'école de prière (*) - no 18

 

... SUITE, p.2

partage du painJésus donne un signe visible de l’accueil à la table où Dieu
se donne.

Avant les paroles de l’institution, il y a les gestes : celui de rompre le pain et celui d’offrir le vin. Celui qui rompt le pain et passe la coupe, c’est avant tout le chef de famille, qui accueille ses parents à sa table, mais ces gestes sont aussi ceux de l’hospitalité, de l’accueil dans la communion conviviale de l’étranger qui ne fait pas partie de la maison. Ces mêmes gestes, au cours du repas où Jésus dit adieu aux siens, acquièrent une profondeur totalement neuve : Il donne un signe visible de l’accueil à la table où Dieu se donne. Dans le pain et le vin, Jésus s’offre et se communique lui-même.

Mais comment tout cela peut-il se réaliser ? Comment Jésus peut-il se donner lui-même à ce moment-là ? Jésus sait que sa vie va lui être enlevée par le supplice de la croix, la peine capitale des hommes non-libres, ce que Cicéron définissait comme « mors turpissima crucis ». Par le don du pain et du vin qu’il offre à la Dernière Cène, Jésus anticipe sa mort et sa résurrection en accomplissant ce qu’il avait dit dans le discours du Bon Pasteur : « Je donne ma vie, pour la reprendre à nouveau. Personne ne me l’enlève : je la donne moi-même. J’ai le pouvoir de la donner et le pouvoir de la reprendre. C’est le commandement que j’ai reçu de mon Père » (Jn 10,17-18). Il offre donc à l’avance la vie qui lui sera enlevée et de cette façon, il transforme sa mort violente en acte libre de don de soi pour les autres et aux autres. La violence subie se transforme en un sacrifice actif, libre, rédempteur.

Une fois encore, dans la prière, commencée selon les formes rituelles de la tradition biblique, Jésus montre son identité et sa détermination à accomplir jusqu’au bout sa mission d’amour total, d’offrande en obéissance à la volonté du Père. L’originalité profonde du don de soi aux siens par le mémorial eucharistique est le sommet de la prière qui caractérise le repas d’adieu avec les siens. En contemplant les gestes et les paroles de Jésus cette nuit-là, nous voyons clairement que le rapport intime et constant avec le Père est le lieu où Il accomplit le geste de laisser aux siens, et à chacun de nous, le sacrement de l’amour, le «Sacramentum caritatis». A deux reprises, ces paroles résonnent au Cénacle : « Faites ceci en mémoire de moi » (1 Co 11,24.25). Par le don de lui-même, Il célèbre sa Pâque, en devenant le vrai Agneau qui porte à son accomplissement tout le culte ancien. C’est pourquoi, en parlant aux chrétiens de Corinthe, Paul affirme : « Le Christ, notre Pâque [notre Agneau pascal !] a été immolé ! Célébrons donc la fête … avec des azymes de sincérité et de vérité » (1 Co 5,7-8).

Profondeur émouvante de la prière de Jésus pour les siens cette nuit-là

Jésus retire Pierre de l'eau
La prière de Jésus, quand s’approche l’épreuve aussi pour ses disciples, soutient leur faiblesse... Et sa prière est particulièrement pour Pierre.

L’évangéliste Luc a conservé des événements de la Dernière Cène un autre élément précieux qui nous permet de voir la profondeur émouvante de la prière de Jésus pour les siens cette nuit-là, son attention pour chacun. En partant de la prière d’action de grâce et de bénédiction, Jésus arrive au don eucharistique, au don de soi, et, alors qu’il donne la réalité sacramentelle décisive, il s’adresse à Pierre. Vers la fin du repas, il dit : « Simon, Simon, voici que Satan vous a réclamés pour vous cribler comme le froment ; mais moi j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères » (Lc 22,31-32). La prière de Jésus, quand s’approche l’épreuve aussi pour ses disciples, soutient leur faiblesse, leur difficulté à comprendre que le chemin de Dieu passe par le Mystère pascal de mort et de résurrection, anticipée dans l’offrande du pain et du vin. L’eucharistie est la nourriture des pèlerins qui devient la force de qui est fatigué, épuisé et désorienté. Et sa prière est particulièrement pour Pierre, afin qu’une fois converti, il confirme ses frères dans la foi. L’évangéliste Luc rappelle que ce fut justement le regard de Jésus qui a cherché le visage de Pierre au moment où celui-ci avait à peine consommé son triple reniement, pour lui donner la force de reprendre le chemin à sa suite : « Et à l'instant même, comme il parlait encore, un coq chanta, et le Seigneur, se retournant, fixa son regard sur Pierre. Et Pierre se ressouvint de la parole du Seigneur, qui lui avait dit » (Lc 22,60-61).

Chers frères et sœurs, en participant à l’Eucharistie, nous vivons de façon extraordinaire la prière que Jésus a faite et fait continuellement pour chacun afin que le mal, que nous rencontrons tous dans notre vie, ne l’emporte pas et qu’agisse en nous la force transformante de la mort et de la résurrection du Christ. Dans l’Eucharistie, l’Eglise répond au commandement de Jésus : « Faites ceci en mémoire de moi » (Lc 22,19; cf. 1 Co 11, 24-26); elle répète la prière d’action de grâce et de bénédiction et, avec elle, les paroles de la transsubstantiation du pain et du vin dans le Corps et le Sang du Seigneur. Nos eucharisties sont un « être attirés » dans ce moment de prière, une union toujours nouvelle à la prière de Jésus.

Depuis le début, l’Eglise a compris les paroles de la consécration comme faisant partie de la prière faite avec Jésus ; comme la partie centrale de la louange pleine de gratitude par laquelle le fruit de la terre et du travail de l’homme nous est à nouveau donné par Dieu comme le corps et le sang de Jésus, comme don de soi de Dieu lui-même dans l’amour accueillant du Fils (cf. Jésus de Nazareth, II, pp. 152-153). En participant à l’Eucharistie, en nous nourrissant de la Chair et du Sang du Fils de Dieu, nous unissons notre prière à celle de l’Agneau pascal dans sa nuit suprême, afin que notre vie ne se perde pas, en dépit de notre faiblesse et de nos infidélités, mais soit transformée.

Chers amis, demandons au Seigneur qu’après nous être dûment préparés, aussi par le Sacrement de la Pénitence, notre participation à son Eucharistie, indispensable pour la vie chrétienne, soit toujours le point le plus haut de toute notre prière. Demandons qu’unis profondément dans son offrande au Père, nous puissions nous aussi transformer nos croix en sacrifice, libre et responsable, par amour de Dieu et de nos frères. Merci.

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(*) "L'école de prière" est une série de catéchèses sur la prière donnée par Benoît XVI, en 2011-2012, dans le cadre des audiences du mercredi. Le pape y regroupe de façon systématique son enseignement sur la prière. Le présent texte est le dix-huitième de la série. Voir la liste des catéchèses présentées lors de ces audiences.

Source du texte: Le Saint Siège, Benoît XVI, Audiences, Mercredi 11 janvier 2012
Source des images:
La fraction du pain: Panaculty; Jésus sauve Pierre du naufrage: Shameless Poperyhaut